J'en parlais dimanche avec Guillaume: qui sont ces gens qui ne prennent même pas le temps, sinon d'appeler, ou au moins d'envoyer une lettre ou - mieux! - un mail-type pour annoncer qu'ils ne veulent pas de ton scénar/de ta démo/de toi ?
Pour avoir, comme sans doute beaucoup de mes rares lecteurs, eu l'occasion d'envoyer moult et moult scénars/démos/DVDs à des boîtes de prods (fiction, clips, pubs), je sais ce que c'est que le rejet. Le problème, c'est que ce rejet intervient neuf fois sur dix, non pas avec un "bang", mais avec un "whimper". Autrement dit: en silence.
Pas de coup de fil. Pas de lettre. Pas de mail.
Dans le monde du cinéma, qui ne dit mot ne consent pas.
Je comprends aisément que ça prenne du temps. Mais mettre dessus un petit stagiaire payé des cacahuètes dont les boîtes de prods raffolent tant, sérieux, c'est pas possible ? Un mail-type déjà écrit, à envoyer, ça prend... 15 secondes ?
Je ne parle même pas des réalisateurs à qui j'ai donné un nombre incalculables de VHS à la bonne époque, quand j'avais 17 ans et que j'allais au ciné Mazarin à Aix assister à toutes les avant-premières. Que Luc Besson, Danny Boyle ou Costa-Gavras soit trop occupé pour mater ton film ou te rappeler, je le comprends sans problème. Mais quand c'est Thomas Vincent, qui n'était à l'époque que le réalisateur de KARNAVAL, qui prend même pas 15 minutes pour mater ton court, croyez moi, ça marque.
Les boîtes qui ont pris le temps de me répondre, je m'en souviens. Les gens de Blue Marlyn, merci. Les gens de La Base, merci. Les gens de La Luna, merci. Et après il y a ceux qui font un effort supplémentaire. En 2006, j'avais envoyé un scénario de court à une plutôt grosse boîte, Why Not Productions. Mon scénar est lue par une jeune femme, Lucie Borleteau. Elle me rappelle pour me dire que la réponse va être "Non". Mais elle me propose de la rencontrer. Pourquoi ? Pour m'expliquer. Je vais donc chez Why Not et je discute avec Lucie qui me détaille les raisons de leur non et ce qu'elle aime, ou pas, dans mon scénar. J'y pense parce que Guillaume a justement eu l'occasion de collaborer avec cette Lucie. Inévitablement, les fameux "Ah bon ?? Toi aussi tu la connais ?" qu'on a tous vécus, me rappellent à quel point le monde en général et celui du cinéma français sont petits.
Dans son blog, le scénariste John August donne des conseils pour bien gérer une rencontre avec un exec américain. Et de préciser: "Soyez sympa avec le mec qui vous amène votre Coca Light avant le rendez-vous. Il y a de bonnes chances qu'il règne sur Hollywood un jour".
Cette fameuse Lucie Borleteau, si on continue tous les deux dans le "biz", on sera amenés à se re-croiser. Et ce jour là, je saurai me souvenir que, elle, un jour en 2006, elle a pris le temps de me parler... Et je sais aussi que, à sympathie/talent égal, si je peux aider ou privilégier Lucie plutôt qu'un autre, je le ferai.
Tout ça pour dire que les mecs qui envoient aujourd'hui leurs petits scénars et leurs petits DVDs... là maintenant... c'est personne. Mais ce sera peut-être différent demain. Répondre à quelqu'un, en plus d'être - on l'oublie trop souvent - la moindre des politesses, c'est aussi un investissement sur l'avenir.