Je reçois énormément de visiteurs sur ce blog qui ont tapé dans Google « Comment organiser festival courts-métrages » et sont tombés sur ce message.
Mais je me suis dit que ce serait quand même intéressant d'en faire un nouveau, plus constructif, où je pourrais éructer toutes mes recommandations issues de mes innombrables visites dans des festivals, petits et grands, amateurs ou pro. Cette envie a été décuplée après ma visite au Concours de courts-métrages de Clichy-la-Garenne, dont l’amateurisme de l’organisation m’a particulièrement irrité.
INSCRIPTION
La plupart de mes griefs concernent les procédures d’inscription, par trop lourdes et archaïques.
La première recommandation serait de passer à une inscription purement dématérialisée : un formulaire sur internet à remplir, très simple, et une case à cocher pour « Signer » le règlement. Et ensuite un film à uploader sur un serveur, ou un lien Vimeo protégé à fournir. Basta.
Au lieu de ça, les festivals, petits et grands, nous obligent à fournir une quantité d’infos longue comme le bras : dates de naissance, format de tournage, nom et prénom de l’ingé son ou autre…
Contentez-vous de la base, de l’indispensable. C’est mieux pour vous, et mieux pour nous. Avez-vous réellement besoin du numéro de fax du réalisateur ?
Demandez-nous juste le synopsis du film, sa durée, et le contact du réalisateur et du producteur.
De plus, ces formulaires d’inscription sont très souvent des PDF non modifiables, à imprimer, et à remplir à la main, avec de toutes petites lignes où on a à peine la place d’écrire. C’est ridicule.
Au moins proposez nous des PDF modifiables, ou des fiches d’inscription sous Word. Ce serait plus facile pour nous… et plus lisible pour vous.
Et, par pitié, laissez la place pour inscrire deux réalisateurs et pas qu’un seul.
Par ailleurs, arrêtez de nous demander d’envoyer des infos inutiles qui ne serviront au catalogue si et seulement si on est sélectionnés : flyers, photos, affiches, fiche technique complète… Les réalisateurs seront ravis de vous fournir ces infos en cas de sélection, mais s’il vous plaît, n’alourdissez pas inutilement les procédures d’inscription.
En ce qui concerne les frais d’inscription, ils sont dans la limite du possible à éviter. S’il y en a, il faut offrir en échange une vraie contrepartie pour les réalisateurs sélectionnés (logement et/ou transport offert, repas gratuits, etc.). Il existe une formule trop peu répandue : l’inscription est gratuite, mais il y a une somme symbolique à payer en cas de sélection.
J’étais tombé sur un petit festival qui demandait 15€ de frais d’inscription. Voulant à tout prix montrer mon film, je les ai déboursés ; la compétition a été annulée : ils n’avaient reçu que trois films !
Et pour ce qui est du format demandé, si l’upload d’un fichier ou l’envoi d’un lien n’est pas techniquement possible, s’il vous plaît, arrêtez d’exiger des K7 Mini-DV ou autres formats du passé… (je m’adresse à vous, oui à vous, les festivals de la FFCV)
INFORMATION SUR LA SELECTION
Combien de festivals ne préviennent jamais en cas de non-sélection ? Des fois, on se retrouve à une semaine de l’évènement à devoir téléphoner pour connaître le choix des augustes sélectionneurs. N’ayant pas reçu d’infos, on se doute de la réponse (négative), mais des fois l’organisation est tellement aux fraises qu’on est en fait sélectionné sans avoir été prévenu.
Des plateformes telles que Le-Court.com permettent d’éviter de répondre à tout le monde individuellement. Mais même sur de tels sites, il arrive qu’on ne soit pas tenu au courant (comme pour le festival de Grenoble, par exemple). Honte.
Bref: soyez gentils et ayez la politesse de nous prévenir (tôt).
DIFFUSION
Si on a la chance d’être sélectionné et qu’on peut participer au festival, voici ce qu’on aimerait y voir :
Une diffusion en DCP. C’est simple, c’est efficace, c’est excellent. Sinon, n’importe quelle projo à partir d’un master HD des films, via un ordinateur par exemple. Mais s’il vous plaît, sus au DVD.
Si vous mettez en place une sorte d’habillage visuel avant chaque projection, s’il vous plaît, ne mettez pas le titre du film. C’est une remarque un peu anale, peut-être, mais quelques films tirent profit de la manière dont ils font apparaître leur titre (à la toute fin du film, ou de manière choc pendant le métrage). Or le fait de le projeter sur l’écran avant-même que le film commence peut nuire à son impact.
Sur le plan du programme, par contre, merci de publier les durées des films.
Et en ce qui concerne l’ordre de diffusion, commencez toujours par le film le plus long ou le plus dur à regarder, puis alternez les durées et les genres (un court, un long, un drôle, un sérieux) en essayant de finir sur un film choc/drôle/troublant. Et évitez les programmes qui excèdent 1h30.
Rallumez les lumières quelques secondes entre chaque film. Le jury peut ainsi prendre des notes, et le public faire une coupure mentale entre les courts. Tous les festivals pro le font ; les amateurs, rarement.
Et surtout, surtout… faites apparaître les équipes des films sur scène et faites les parler. C’est hyper important. Dans combien de festivals me suis-je déplacé où les réalisateurs n’étaient pas présentés au public ? Du coup, personne ne sait qui a réalisé quoi, et les échanges sont impossibles.
Amis organisateurs, sachez qu’on ne vient pas dans vos festivals juste pour revoir une 1000e fois nos propres films, ou pour vous faire plaisir : on y va pour RENCONTRER DES GENS. On y va pour RENCONTRER LE PUBLIC. Et RENCONTRER D’AUTRES REALISATEURS. Merci de nous aider.
Et si on monte sur scène, s’il vous plaît, faites appel à un animateur compétent. Arrêtez les séances de questions-réponses nazes à base de « Si vous avez une question dans le public, n’hésitez pas »… et là… silence de mort. Il faut que vous offriez au public l’occasion de poser des questions, mais en attendant qu’ils se chauffent, POSEZ-NOUS des questions. Faites nous parler. Et le reste arrivera naturellement…
PRIX DU PUBLIC
Le prix du public est souvent une mascarade qui privilégie :
- Le film qui a le plus fait rire le public
- Le film qui a ramené le plus de membres de l’équipe dans la salle.
Il faut donc en finir avec les votes simples, tels que « Ecrivez sur le bulletin le titre de votre film préféré ». Déjà, ce processus favorise les films vus lors des séances les plus peuplées, mais il empêche aussi toute nuance dans le choix.
La seule solution – qui demande un peu plus de temps, je vous l’accorde : chaque spectateur donne une note à chaque film qu’il voit. Une moyenne est ainsi faite, où on enlève les extrêmes (pour éviter que l’équipe d’un film se surnote pour faire monter sa moyenne) et/ou on pondère les moyennes pour éviter de trop grandes disparités entre les films beaucoup vus et les films peu vus.
C’est le seul moyen efficace et juste.
Et pendant que le jury délibère, par pitié, coupez court aux temps morts : organisez une projection hors-compétition, ou offrez nous un pot (car oui, les pots c’est super important aussi… C’est souvent de là que viennent nos meilleurs souvenirs de « festoches »).
ANNONCE DU PALMARES
C'était un running gag sur le Forum des Vidéastes Amateurs. Combien de festivals qui ne communiquent pas sur leur palmarès ?
Et combien de dimanche soirs ai-je passé à attendre en vain un petit coup de fil, ou un mail, pour connaître le sort réservé à un de mes courts diffusé la veille à l'autre bout de la France ?
Bien évidemment, le lundi matin, toujours rien. Ni par mail, ni sur le site. Et bien sûr personne ne réponds jamais au téléphone.
Tout ça pour dire: soyez cools et annoncez votre palmarès le plus rapidement possible et par tous les biais. Site internet, Facebook, mail, coup de fil.
Je sais que le festival est sur le point de se terminer et qu'il faut ranger les chaises et nettoyer la salle, mais ça prend vraiment que deux minutes à faire. Donc faites-le. Et plus vite que ça.
MEA CULPA
Amis organisateurs, passés ou futurs, merci de m’avoir lu jusqu’au bout. Je sais que nous, les réalisateurs, on est pas toujours au point non plus (fiche d’inscription mal remplie, film envoyé dans le mauvais format, réponse tardive aux mails…), mais bon, voilà en toute modestie les quelques conseils que je me permet de vous offrir.
Bon courage !